L’exploration de l’ile, la découverte des environs, le boulot à faire
et la compréhension du tissu local d’Aride se sont bien améliorés aujourd’hui.
Commençons par le boulot, vu que c’est la première chose à faire. Bon,
je dis boulot mais nourrir les Pies chanteuses, c’est tout sauf un job. J’avais
vu le fonctionnement hier dans sa grande ligne mais là, j’ai eu le détail.
Déjà, je sais avec quoi on les nourrit : Un œuf brouillé qu’on va donc
répartir entre 10 oiseaux sur cinq spots différents. Une petite fiche permet de
contrôler quel oiseau est où grâce au baguage et surtout de voir s’il en manque
un, qui est-il car normalement, ils ne bougent pas trop de leur territoire. Là,
maintenant, grâce à Delphine, je connais toute la procédure établie.
Maintenant, il n’y a plus qu’à discuter sur le bien-fondé ou non de les
nourrir. Ils ont aussi des nichoirs et lors d’un contrôle, une femelle y avait
été retrouvée morte les semaines précédentes donc, s’ils meurent, ce ne serait
normalement pas de faim, sauf si on les intoxique ou leur file de l‘eau
croupie. Bref, les questions sont légitimes sur l’aspect « soin » à
apporter ou non et comment l’apporter. Je peux juste dire que les
Magpies-Robins qui vivent près des maisons, le matin, ils font le pied de grues
à votre table pendant que vous prenez votre petit-déjeuner.
Sur le retour, on passe par la plage voir s’il y a des nouvelles traces
de Tortues imbriquées, Hawksbill Turtle Eretmochelys imbricata. Rien. Au
niveau de nos bateaux pneumatiques, en face de nos logements, Mellinda nous
fait de grands signes. Ah bah si, il y en une juste dessous un bateau, qui
gratte le sable. Heureusement, elle dégage, à cause de notre présence sûrement.
Pondre ici n’était pas le meilleur endroit de la plage. On la stoppe avant son
retour à l’eau, c’est costaud comme bestiole, on voit qu’elle est baguée, à la
base de chaque patte avant, on mesure la longueur de la carapace, 86 cm et on
constate que cette dernière est parasitée, par des mollusques je dirais, qui
creusent des alvéoles sur la périphérie sa carapace. C’est assez moche. Puis on
la laisse retourner à l’eau.
Oui, pour attraper une tortue, il faut courir. |
Le parasitage sur la zone externe de la carapace. |
Ensuite, la volontaire Delphine me propose de profiter de la sortie en
bateau pour Praslin pour que Jim, le pilote, nous jette à l‘eau en chemin près
d’un ilot pour faire de la plongée en tuba et il repassera nous récupérer une
heure plus tard. L’endroit semble être un bon spot, des snorkleurs ont déjà été
vus et une volontaire précédente y avait déjà été. Avec l’accord du Manager,
par téléphone, c’est parti ! Ça tombe bien parce que je voulais nager de
toute façon et pensais faire cela encore sur Aride. Mellinda a un peu
d’appréhension pour nous, c’est vrai que l’ilot n’a que des côtes rocheuses
donc en cas de pépin pour se poser, c’est…. Bref tout ira bien. Ah je
t’inquiète là ma mère.
A part des coups de soleil sous les cuisses et les genoux, tout s’est
bien passé. Oui, je n’avais pas pensé que ces parties seraient bien exposées au
soleil, même si elles étaient dans l’eau. On est restés plus d’une heure trente
et le spot était riche en poissons, une cinquantaine d’espèce je dirais, plutôt
en nombre. Les filles m’ont pourtant dit que le mois dernier, des milliers de
poissons se sont échoués sur les plages seychelloises, peut-être à cause d’un
manque d’oxygène.
J’y ai vu des Moorish Idol Zanclus cornutus (je l’avais déjà mis
à Cairns mais là, pas de doute !!), des Silver Pompano, souvent en bandes,
Trachinotus blochii, un poisson-volant, les autres, on a des photos avec
une GoPro, donc j’espère identifiables. Par contre, j’ai reconnu sans mal deux
raies, la Giant Reef Ray Taenuria melanospilos et la Spotted Eagle Ray Aetobatus
narinari. La première voguait bien et s’observait facilement, la seconde se
dissimulait entre les rochers et se méritait plus. Mais la première a quand
même plus de classe. Le top est encore une fois d’avoir une tortue en train de nager
près de soi. J’hésite pour l’espèce. La chose sûre est que c’était une petite
jeune de quelques années qui a commencé par s’approcher, curieuse, avant de
s’éloigner, prudente. L’observation était longue donc magistrale.
Le bateau nous récupère. Uzice est à bord (au passage, Uzice s’appelle
Uzice Samedi. Quant à Jim, le pilote, c’est Jim Uzice. Ça ne s’invente pas). Au
lieu de retourner directement à la plage, nous faisons un tour de l’ile (je
jublie, enfin je vais voir son contour). De l’autre côté, c’est granitique à
mort sur les premiers mètres puis les arbres dominent et perchés dessus, des
centaines de Frégates. Elles volent au large, très haut souvent, quelques-unes
proches du bateau, certaines se posent. Une gonfle son sac rouge, au niveau de
la gorge, dans un arbre mais je le rate (je devrais l’avoir je pense un jour).
La morphologie de cet oiseau est vraiment incroyable, esthétiquement original
et réussi. Le bateau finit son tour en allant au large. Nos deux seychellois
lancent chacun une ligne de pêche et on file sur les eaux vers les Noddis, là
où ils sont, il y a du poisson. Bon, ils n’ont rien attrapé mais un puffin qui
vole dans le même sens que toi, à 5 mètres, juste au-dessus de l’eau, c’est
aussi un moment qui s’apprécie très fortement.
Retour à la civilisation, je sais enfin comment accéder à internet sur
ce trou perdu et bon sang, le débit est top. Je regarde mes messages quand on
vient me chercher pour aller voir une Tortue imbriquée qui va pondre. Résultat,
je compte les œufs pendant que les filles baguent et mesurent l’individu. 198
futurs petits chéloniens déposés dans leur coque en balle de ping-pong plus
tard, mémère rebouche son trou et repart pendant qu’une autre arrive. Cette
dernière, peut-être dû à notre présence, fait demi-tour à mi-chemin (un
half-moon dans le jargon protocolaire) et s’en va. On la bloque juste alors
qu’elle a les pattes dans l’eau pour voir ses bagues.
Niveau naturalisme, c’est… ah ouais, maintenant que je viens de tout
écrire, c’est de la balle quand même.
Demain, c’est l’anniversaire de Delphine, le jour de la Saint-Nicolas,
ouaiche. Pour l’occasion, elle veut s’atteler à faire un gâteau qui plaira à
tout le monde, notamment aux indiens. Voilà comment on ouvre le chapitre
« Un indien dans mon ile ».
Nos indiens dorment dans des baraquements à 50 mètres de nous. Je pense
qu’ils sont deux par chambre, dans la même surface où je vis seul. Ils sont ici
pour construire de nouveaux bâtiments et parmi eux, il y a un indien cuistot,
spécialement là pour nourrir les autres. Alors, un indien, ça mange quoi ?
Pour faire un gâteau qui plaise à tout le monde, il faut connaître les goûts de
chacun. On va bien s’amuser. On demande donc au cuisinier, il est le plus apte
à répondre… s’il parlait anglais. De toute façon, aucun ne parle vraiment
anglais. On arrive toutefois à savoir qu’ils ne mangent pas d’œufs (ça élimine
beaucoup de gâteaux), pas de beurre, pas de lait. Enfin si pour le lait, enfin
non, enfin si finalement puis de nouveau non. J’avais l’impression de revivre
un sketch de Chevalier-Laspalès. En vrai, quand ça t’arrive, tu te dis que ça
va être très compliqué d’aboutir à une réponse définitive. On comprend
finalement que déjà, il ne pige rien, qu’il sait dire « J’aime pas »
en français mais surtout qu’il ne mange que ce qu’il cuisine. Pas grave, la
petite ne se démonte pas. Elle fera un gâteau demain qu’avec des produits
qu’ils mangent et on verra s’ils en goûtent.
On sait que leur repas sont quasiment qu’avec des légumes et du riz.
Ils ont du lait en poudre et leur « beurre » est une pâte huileuse
solidifiée venant de la palme et du soja, pas top-top.
La veille, on avait joué aux cartes avec eux et ce soir, on a remis ça
mais avec un jeu indien. On a mis du temps à comprendre les règles (parce que
soit, ils trichaient, par inattention je pense, soit ils jouaient sans
stratégie) qui ressemblent un peu à la belotte mais après trois parties,
j’étais bien dedans. Il faut surtout bien surveiller les erreurs de jeu (ils en
font tout le temps) mais l’ambiance est bon enfant.
Et voilà une journée bien sympathique sur Aride. Ah tiens, pour finir
la soirée, pendant que j’écris, une souris passe. Va falloir que j’en parle
demain.
Voilà une journée bien remplie.
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