dimanche 6 décembre 2015

journal de bord, 05/12/2015


L’exploration de l’ile, la découverte des environs, le boulot à faire et la compréhension du tissu local d’Aride se sont bien améliorés aujourd’hui.


Commençons par le boulot, vu que c’est la première chose à faire. Bon, je dis boulot mais nourrir les Pies chanteuses, c’est tout sauf un job. J’avais vu le fonctionnement hier dans sa grande ligne mais là, j’ai eu le détail. Déjà, je sais avec quoi on les nourrit : Un œuf brouillé qu’on va donc répartir entre 10 oiseaux sur cinq spots différents. Une petite fiche permet de contrôler quel oiseau est où grâce au baguage et surtout de voir s’il en manque un, qui est-il car normalement, ils ne bougent pas trop de leur territoire. Là, maintenant, grâce à Delphine, je connais toute la procédure établie. Maintenant, il n’y a plus qu’à discuter sur le bien-fondé ou non de les nourrir. Ils ont aussi des nichoirs et lors d’un contrôle, une femelle y avait été retrouvée morte les semaines précédentes donc, s’ils meurent, ce ne serait normalement pas de faim, sauf si on les intoxique ou leur file de l‘eau croupie. Bref, les questions sont légitimes sur l’aspect « soin » à apporter ou non et comment l’apporter. Je peux juste dire que les Magpies-Robins qui vivent près des maisons, le matin, ils font le pied de grues à votre table pendant que vous prenez votre petit-déjeuner.

Sur le retour, on passe par la plage voir s’il y a des nouvelles traces de Tortues imbriquées, Hawksbill Turtle Eretmochelys imbricata. Rien. Au niveau de nos bateaux pneumatiques, en face de nos logements, Mellinda nous fait de grands signes. Ah bah si, il y en une juste dessous un bateau, qui gratte le sable. Heureusement, elle dégage, à cause de notre présence sûrement. Pondre ici n’était pas le meilleur endroit de la plage. On la stoppe avant son retour à l’eau, c’est costaud comme bestiole, on voit qu’elle est baguée, à la base de chaque patte avant, on mesure la longueur de la carapace, 86 cm et on constate que cette dernière est parasitée, par des mollusques je dirais, qui creusent des alvéoles sur la périphérie sa carapace. C’est assez moche. Puis on la laisse retourner à l’eau.
Oui, pour attraper une tortue, il faut courir.

Le parasitage sur la zone externe de la carapace.
Ensuite, la volontaire Delphine me propose de profiter de la sortie en bateau pour Praslin pour que Jim, le pilote, nous jette à l‘eau en chemin près d’un ilot pour faire de la plongée en tuba et il repassera nous récupérer une heure plus tard. L’endroit semble être un bon spot, des snorkleurs ont déjà été vus et une volontaire précédente y avait déjà été. Avec l’accord du Manager, par téléphone, c’est parti ! Ça tombe bien parce que je voulais nager de toute façon et pensais faire cela encore sur Aride. Mellinda a un peu d’appréhension pour nous, c’est vrai que l’ilot n’a que des côtes rocheuses donc en cas de pépin pour se poser, c’est…. Bref tout ira bien. Ah je t’inquiète là ma mère.

A part des coups de soleil sous les cuisses et les genoux, tout s’est bien passé. Oui, je n’avais pas pensé que ces parties seraient bien exposées au soleil, même si elles étaient dans l’eau. On est restés plus d’une heure trente et le spot était riche en poissons, une cinquantaine d’espèce je dirais, plutôt en nombre. Les filles m’ont pourtant dit que le mois dernier, des milliers de poissons se sont échoués sur les plages seychelloises, peut-être à cause d’un manque d’oxygène.

J’y ai vu des Moorish Idol Zanclus cornutus (je l’avais déjà mis à Cairns mais là, pas de doute !!), des Silver Pompano, souvent en bandes, Trachinotus blochii, un poisson-volant, les autres, on a des photos avec une GoPro, donc j’espère identifiables. Par contre, j’ai reconnu sans mal deux raies, la Giant Reef Ray Taenuria melanospilos et la Spotted Eagle Ray Aetobatus narinari. La première voguait bien et s’observait facilement, la seconde se dissimulait entre les rochers et se méritait plus. Mais la première a quand même plus de classe. Le top est encore une fois d’avoir une tortue en train de nager près de soi. J’hésite pour l’espèce. La chose sûre est que c’était une petite jeune de quelques années qui a commencé par s’approcher, curieuse, avant de s’éloigner, prudente. L’observation était longue donc magistrale.

Le bateau nous récupère. Uzice est à bord (au passage, Uzice s’appelle Uzice Samedi. Quant à Jim, le pilote, c’est Jim Uzice. Ça ne s’invente pas). Au lieu de retourner directement à la plage, nous faisons un tour de l’ile (je jublie, enfin je vais voir son contour). De l’autre côté, c’est granitique à mort sur les premiers mètres puis les arbres dominent et perchés dessus, des centaines de Frégates. Elles volent au large, très haut souvent, quelques-unes proches du bateau, certaines se posent. Une gonfle son sac rouge, au niveau de la gorge, dans un arbre mais je le rate (je devrais l’avoir je pense un jour). La morphologie de cet oiseau est vraiment incroyable, esthétiquement original et réussi. Le bateau finit son tour en allant au large. Nos deux seychellois lancent chacun une ligne de pêche et on file sur les eaux vers les Noddis, là où ils sont, il y a du poisson. Bon, ils n’ont rien attrapé mais un puffin qui vole dans le même sens que toi, à 5 mètres, juste au-dessus de l’eau, c’est aussi un moment qui s’apprécie très fortement.

Retour à la civilisation, je sais enfin comment accéder à internet sur ce trou perdu et bon sang, le débit est top. Je regarde mes messages quand on vient me chercher pour aller voir une Tortue imbriquée qui va pondre. Résultat, je compte les œufs pendant que les filles baguent et mesurent l’individu. 198 futurs petits chéloniens déposés dans leur coque en balle de ping-pong plus tard, mémère rebouche son trou et repart pendant qu’une autre arrive. Cette dernière, peut-être dû à notre présence, fait demi-tour à mi-chemin (un half-moon dans le jargon protocolaire) et s’en va. On la bloque juste alors qu’elle a les pattes dans l’eau pour voir ses bagues.

Niveau naturalisme, c’est… ah ouais, maintenant que je viens de tout écrire, c’est de la balle quand même.

Demain, c’est l’anniversaire de Delphine, le jour de la Saint-Nicolas, ouaiche. Pour l’occasion, elle veut s’atteler à faire un gâteau qui plaira à tout le monde, notamment aux indiens. Voilà comment on ouvre le chapitre « Un indien dans mon ile ».

Nos indiens dorment dans des baraquements à 50 mètres de nous. Je pense qu’ils sont deux par chambre, dans la même surface où je vis seul. Ils sont ici pour construire de nouveaux bâtiments et parmi eux, il y a un indien cuistot, spécialement là pour nourrir les autres. Alors, un indien, ça mange quoi ? Pour faire un gâteau qui plaise à tout le monde, il faut connaître les goûts de chacun. On va bien s’amuser. On demande donc au cuisinier, il est le plus apte à répondre… s’il parlait anglais. De toute façon, aucun ne parle vraiment anglais. On arrive toutefois à savoir qu’ils ne mangent pas d’œufs (ça élimine beaucoup de gâteaux), pas de beurre, pas de lait. Enfin si pour le lait, enfin non, enfin si finalement puis de nouveau non. J’avais l’impression de revivre un sketch de Chevalier-Laspalès. En vrai, quand ça t’arrive, tu te dis que ça va être très compliqué d’aboutir à une réponse définitive. On comprend finalement que déjà, il ne pige rien, qu’il sait dire « J’aime pas » en français mais surtout qu’il ne mange que ce qu’il cuisine. Pas grave, la petite ne se démonte pas. Elle fera un gâteau demain qu’avec des produits qu’ils mangent et on verra s’ils en goûtent.

On sait que leur repas sont quasiment qu’avec des légumes et du riz. Ils ont du lait en poudre et leur « beurre » est une pâte huileuse solidifiée venant de la palme et du soja, pas top-top.

La veille, on avait joué aux cartes avec eux et ce soir, on a remis ça mais avec un jeu indien. On a mis du temps à comprendre les règles (parce que soit, ils trichaient, par inattention je pense, soit ils jouaient sans stratégie) qui ressemblent un peu à la belotte mais après trois parties, j’étais bien dedans. Il faut surtout bien surveiller les erreurs de jeu (ils en font tout le temps) mais l’ambiance est bon enfant.

Et voilà une journée bien sympathique sur Aride. Ah tiens, pour finir la soirée, pendant que j’écris, une souris passe. Va falloir que j’en parle demain.


Voilà une journée bien remplie.

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