dimanche 22 octobre 2017

La ciudad perdida, 4 jours de trek à en suer

Dimanche 15 octobre 2017

C’est le jour du départ pour un trek de 4 jours à la Ciudad Perdida. La jeep doit passer me chercher entre 8h et 8h30. Le Jackie Hostal propose son petit-déjeuner dès 7h30. Cela devrait me laisser parfaitement le temps d’en profiter avant de partir. Sauf que les gens qui préparent le repas le plus important de la journée ne sont pas du matin et à 7h30, ils sont encore dans la mise en place et à se réveiller (je peux noter d’ailleurs que le petit groupe de 4-5 jeunots hispaniques chargés de préparer les plats le matin ou le soir sont particulièrement doués pour respirer la joie de vivre (c’est ironique)). J’ai mon petit-dej’ à 8h10. La réception m’avertit à 8h12 que l’agence touristique vient d’arriver évidemment. J’avale tout en deux-deux et je file rejoindre la jeep. A l’intérieur, déjà une participante, Jodie, australienne en voyage depuis juillet.
Nous allons à l’hôtel Miramar, siège de notre tour operator Guias & Baquianos, il est 8h30 à peine. Puis, on attend. Là, je comprends que j’aurais pu prendre mon temps pour manger. Un jeune homme nous rejoint depuis l’intérieur de l’hôtel, Alex, américain professeur d’anglais dans le secteur de Cordoba. Serons-nous que trois ? Toujours est-il que c’est le moment de sortir son passeport et de payer les 90% restants (par cache « effectivo » ou carte bancaire « tarjeta ») des 850 000 COP. On attend à nouveau, il est 9h30. Un moustique m’attaque déjà à l’hôtel.
9h50 : On décolle ! Nous sommes cinq. Freddy, un américain d’origine colombienne est déjà dans le véhicule et fera office d’interprète. Le quatrième client est Ron, un israélien qui a quitté son job et voyage.
10h20, nous rejoignons l’hôtel « The dreamer » pour récupérer deux couples, chacun en vacances pour quelques semaines en Colombie. Sanne et Floris, des jeunots hollandais ; Roisin et Mick, irlandais des environs de Dublin. Nous sommes donc 8, constituant une jolie petite équipe qui apprend à se connaître durant le trajet qui mène au début du trek.
Le voyage se passe en deux temps. D’abord, pendant une heure, nous roulons sans problème jusqu’à l’entrée officielle du site, là où on nous donne un petit bracelet à coller autour du poignet. Puis nous repartons pour une heure de route caillouteuse et arpentons la montagne jusqu’à El Mamey, village de 40-50 familles qui résonne aussi comme le départ pour l'aventure.

L'entrée d'El Mamey

Un peu de repos pour les mules avant de repartir
Midi quinze, à peine arrivés, à table ! Bonne assiette mélangeant Arepa – riz – lentilles – salade de carottes/oignons/tomates et du poulet. Nous faisons la connaissance de José « Momo », notre guide. Il nous présente le déroulement des quatre prochains jours, les lieux où nous dormirons, la répartition journalière des 46 kilomètres à parcourir et le dénivelé que nous allons affronter.
On passe de 120m à 1200m. 1100 mètres de dénivelé en 2 jours, ça va (oui, deux jours pour aller et deux pour revenir grosso modo) sauf que ce trek ne fait que monter et descendre. Je pense qu’on fait le double en fait.
Nous avons 10 minutes de pause pour finir de nous préparer : mettre de l’anti-moustique, de la crème solaire. Il est 13h, c’est parti !!


Aujourd’hui, nous devons réaliser entre 3 et 4 heures de marche. Le groupe me semble affûté (je risque d’être en queue de peloton moi avec des gaillards comme ça). Effectivement, bien que nous ayons eu 3-4 bonnes pauses en chemin, nous arrivons à Casa Alfredo à 16h30 après 3h30 de bonne rando et premières transpirations.
Sur le chemin, à chaque arrêt, il est possible d’acheter à boire, c’est un vrai business. Une boisson gazeuse à 2000 COP à Santa Marta vaut 3000 à El Mamey et monte à 5000 au plus loin du trek. La tentation est grande vu la chaleur et l’effort fourni qui invite à la récompense. Des jus pressés sur place sont aussi disponibles.
A mi-parcours, une halte nous permet d’avoir des morceaux de pastèque à déguster (c’est inclus ça). Ils sont de vrais instants de plaisir et réconfort. Ils m’hydratent bien et il est possible de resservir (j’en prends trois parts).

Premier passage de rivière
Les premiers enfants Kogui que nous croisons.

Un arrêt à une tienda du trek.

Petite pause qui fait du bien
Le chemin est facile au début. Ça grimpe mais ça se fait bien. Le temps est nuageux, idéal pour ne pas trop souffrir de la chaleur. Suer arrive très vite mais je n’imagine pas comment ce serait sous un grand ciel bleu et un soleil assassin. Il ne pleut pas (ou des semblants de gouttes qui ne durent pas longtemps) et pourtant, à mi-chemin, la terre est humide ; glaise, argile, juste ce qu’il faut pour avoir un peu de sensation, d’aventure dans le sang. On franchit quelques ruisseaux (ne pas glisser, ne pas glisser, oups… bon ça va). On monte, on descend, on croise des chevaux, des mules, des vaches, des enfants Kogui et encore des mules. A dire vrai, ces bestioles sont le plus gros danger de la journée.
Dès le début de la marche, c’est vert. Les arbres sont hauts, recouvrant monts et vallons. Des urubus nous survolent, des corbeaux aussi. Beaucoup de chants d’oiseaux, quelques-uns sont vraiment cools et originaux mais ils sont plutôt loin dans la montagne. Certains petits oiseaux chantent à proximité mais je ne les aperçois pas.
La terre est ocre, blanche, orangée. Ces couleurs sont assez variées (mais pas de rouge).
Il y a eu à un moment pendant dix mètres une bonne odeur sur le chemin. Sinon, ça pue le crottin.

Un autre groupe de randonneurs nous suit, dont quelques français. Nous pensons qu’ils nous rejoindrons mais finalement, ils s’arrêtent au camp juste avant le nôtre.
Nous dînons vers 18h. Poisson pour tout le monde (sauf moi, j’ai des œufs). Le plat est salé mais ça compense ce qu’on a sué. Un jus tomate-citron pour accompagner. Ils utilisent la tomate autant comme un fruit qu’un légume. Le groupe est pas mal uni, ça papote, c’est cool.
La première journée est ce qu’on pourrait qualifier de parfaite. La nourriture est correcte et rassasie bien (et petite barre chocolatée en dessert, miam) et nous avons rencontré Carlos, notre cuisinier pour le trek.

Après le repas, José nous raconte l’histoire récente de la région. C’est tout comme raconté dans ce blog :
Sauf que c’est mieux dit que par moi. Mais je tente quand même.
Cette région a subi 40 ans de guerre civile. On cultivait de la marijuana et de la coca jusqu’en 2007, c’est fini normalement. Ces cultures ont poussé les paysans à se militariser et s’affronter entre eux. 2007 a marqué la fin des paramilitaires (ce n’étaient pas des FARC).
En 2003, huit étrangers furent kidnappés, ce qui a poussé les locaux à arrêter les plantations de coca. Avec des aides du gouvernement, ils ont commencé la culture de cacao et du café mais ça n’a pas pris.
Les gens ont maintenant des métiers liés au tourisme mais c’est moins rentable. Mais depuis 10 ans, le trek fonctionne (il n’y a qu’à voir la hausse de l’expédition chaque année) sauf qu’avant, il fallait emmener sa tente et nourriture, c’était bien plus dur.

Il y avait de l’or et des céramiques que les pilleurs ont pris. José, d’ailleurs, allait piller avec son grand-père quand il était gamin. Les locaux colombiens qui font cela sont appelés des Huaqueros (ce ne sont pas des indigènes, attention). Un marché noir vers la France et l’Espagne a existé de 1975 aux années 80. Il nous fait un petit topo sur la Ciudad Perdida, qui date de 600 après Jésus Christ. Les indigènes seraient à ce jour environ 3000 mais sûrement plus vu que leur recensement est compliqué.

Il finit la journée par une anecdote sur le fait que la ville de départ El Mamey s’appelle aussi Machete en raison d’un meurtre à la machette dans la bourgade (toujours sympa ces histoires-là) et en petit bonus, il nous raconte une histoire de fantômes quand il avait 11-12 ans, en 2002, avec un homme Kogui sans pied ni tête qui attendait au niveau de l’école (autrefois hôpital) quand il marchait de nuit sur le chemin.

Après ses dires, le groupe fourmillait de questions, sur l’histoire récente, sur les indigènes (une fille Kogui à 20 ans peut déjà avoir 7-8 enfants. Le père a une trentaine d’années lui ; les familles décident des mariages).
Nous nous couchons à 20h, il fait nuit depuis deux heures déjà.

Nous nous endormons avec les bruits de la nature, amphibiens, insectes et rivière sous une moustiquaire parfaitement isolante).
Les bruits de la nature dominent les battements de mon cœur. Ils s’organisent en une rythmique saccadée. Ils s’articulent sous un tempo régulier, celui de l’eau qui percute les rochers, unique métronome en ces hauteurs.




ça grimpe

La table et les lits derrière.

C'est tout propre comme camp.

Ah oui, en Colombie, ils adorent colorer l'extrémité des poteaux.

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